L’impact du Nutri-Score sur les choix alimentaires des consommateurs

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Publié le 05 avril 2024

Le Nutri-Score a fait son apparition sur l’emballage de nos produits alimentaires depuis plusieurs années maintenant, et s’avère désormais connu de tous. Ce système d’étiquetage n’en étant plus à ses balbutiements, le recul commence désormais à être suffisant pour étudier et connaître son impact sur les choix alimentaires des consommateurs. Entre ses bénéfices, ses limites et ses perspectives d’évolution, le Nutri-Score n’a pas fini de faire parler de lui, et a très certainement un rôle important à jouer quant aux décisions d’achat, à la santé publique et à l’innovation dans le domaine agroalimentaire.

1. Introduction au Nutri-Score

A. Définition et objectifs du Nutri-Score

Le Nutri-Score est une initiative dont l’objectif est d’orienter les choix alimentaires des consommateurs vers les denrées qui sont considérées comme les plus saines, et les meilleures pour leur santé. Ce système d’étiquetage nutritionnel simplifié a été mis en place en France sur la base de l’article 14 de la loi de Modernisation de Notre Système de Santé du 26 janvier 2016. Depuis son lancement, la Belgique, la Suisse, l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas et le Luxembourg ont également recommandé son utilisation.

Il se présente sous la forme d’un logo coloré, et fait apparaître une note qui va de A, mise en évidence en vert foncé pour indiquer qu’il s’agit du meilleur choix nutritionnel, à E, qui est quant à elle sur fond rouge pour souligner qu’il s’agit d’un moins bon choix nutritionnel.

Avec le Nutri-Score, les informations nutritionnelles complexes sont synthétisées en un seul indicateur facile à comprendre, ce qui permet aux consommateurs d’effectuer un choix plus éclairé au moment de l’achat en comparant la qualité nutritionnelle des produits. Cela soutient le meilleur équilibre de l’alimentation, et aide à prévenir les maladies qui sont directement liées aux mauvaises habitudes alimentaires que peuvent être l’obésité, le diabète de type 2 ou certains troubles cardiovasculaires.

Le développement et la mise en œuvre du Nutri-Score s’inscrivent dans une démarche de santé publique plus large, dont l’ambition est de combattre l’augmentation des maladies non transmissibles via la promotion de régimes alimentaires plus sains. En incitant les industriels à améliorer la composition de leurs produits pour que ceux-ci soient mieux classés, le Nutri-Score encourage également l’innovation dans l’industrie agroalimentaire, et contribue ainsi à l’amélioration continue de la qualité nutritionnelle des produits.

B. Fonctionnement et classification des aliments

La classification établie par le Nutri-Score repose sur une formule algorithmique qui évalue la qualité nutritionnelle des produits pour chaque 100 grammes ou 100 millilitres consommés. Il prend en compte la teneur en nutriments et en aliments à favoriser, tels que les fruits, les légumes, les fibres, les protéines ou encore les légumineuses, et à l’inverse celle en nutriments à limiter, comme les sucres ajoutés, les acides gras saturés, les calories ou le sel. 

Le calcul ainsi fait permet d’attribuer un Nutri-Score à chaque produit. Comme indiqué ci-dessus, la classification des produits alimentaires va de A à E, et peut être résumée comme suit :

  • Catégorie A (vert foncé) : aliments les plus bénéfiques pour la santé, à la teneur riche en bons nutriments et faible en substances à limiter ;
  • Catégorie B (vert clair) : bon choix nutritionnel, bien équilibré en ingrédients et nutriments bénéfiques pour la santé, mais légèrement moins optimal que la catégorie A ;
  • Catégorie C (jaune) : qualité nutritionnelle moyenne, avec un équilibre entre bons et mauvais nutriments, et convient donc pour une consommation occasionnelle ;
  • Catégorie D (orange) : produit contenant des nutriments à limiter plus significativement, qu’il est donc recommandé de consommer avec parcimonie ;
  • Catégorie E (rouge) : denrées ayant la qualité nutritionnelle la plus faible, car riches en substances qu’il est fortement conseillé de restreindre.

2. L’impact du Nutri-Score sur les comportements des consommateurs

A. Influence du Nutri-Score sur la prise de décision d’achat

La présence du Nutri-Score sur les emballages alimentaires fait office de réel catalyseur pour guider les consommateurs vers des choix alimentaires plus équilibrés et sains. Cette influence se manifeste principalement via la simplification de la compréhension des valeurs nutritionnelles, puisqu’elle permet aux individus de faire des comparaisons rapides et efficaces entre différents produits au sein d’une même catégorie alimentaire.

D’après une étude réalisée en 2021 et relayée par le Gouvernement, 43% des adultes français ont indiqué que le Nutri-Score pouvait faire changer certaines de leurs habitudes alimentaires de façon durable. Il impacte donc positivement leurs décisions d’achat en les incitant à privilégier les produits classés dans les catégories A et B, au détriment de ceux qui figurent dans les catégories inférieures. Cette tendance est d’autant plus marquée chez les consommateurs qui ont déjà une certaine sensibilité aux questions de nutrition et de santé.

L’impact du Nutri-Score s’étend également à la perception globale des marques et des enseignes. Les consommateurs sont susceptibles d’avoir une image plus positive des marques qui adoptent volontairement ce système d’étiquetage sur leurs produits, puisqu’ils le considèrent comme un gage de transparence et de responsabilité envers la santé publique. Cette confiance accrue peut favoriser la fidélisation de la clientèle envers ces marques, perçues comme étant les plus alignées avec les préoccupations actuelles en matière de santé.

B. Effets sur la santé publique

Les effets bénéfiques du Nutri-Score sur la santé publique sont de plus en plus significatifs chaque année. Il encourage tout d’abord la consommation d’aliments qui sont bénéfiques pour la santé, tels que les fruits, les légumes ou les céréales complètes, et réduit l’attrait pour les produits riches en nutriments qui peuvent être préjudiciables pour la santé, à l’instar des sucres ajoutés, des graisses saturées, et du sel. 

Cet effort soutient la transition vers une alimentation plus saine, et réduit donc à grande échelle les risques associés aux maladies chroniques liées à une mauvaise alimentation. Même si le recul est encore insuffisant pour que des études démontrent clairement l’influence positive du Nutri-Score sur la santé publique, cet indicateur a été instauré en se basant sur des études scientifiques largement étayées pour attester de son effet vertueux. 

Le Nutri-Score sert ainsi d’outil éducatif, puisqu’il augmente la sensibilisation et la compréhension des consommateurs quant à l’importance d’une alimentation équilibrée. Cette démarche favorise l’adoption de modes de vie plus sains, et peut avoir une résonance qui va bien au-delà de l’alimentation en incitant les individus à repenser leurs habitudes de consommation globales et leurs pratiques quotidiennes, ceci afin de mieux prendre soin de leur santé.

C. Réactions et adaptations des industriels

Avec l’instauration du Nutri-Score, et face à la demande croissante des consommateurs pour des produits affichant des scores favorables, de nombreux industriels de l’agroalimentaire ont fait le choix de revoir leurs recettes pour améliorer la qualité nutritionnelle de leurs denrées alimentaires. En réduisant les teneurs en sucres, en graisses saturées ou encore en sel, les marques ont réussi à améliorer le Nutri-Score de leurs produits, et par là même à les rendre plus sains et qualitatifs.

Cette adaptation à la nouvelle réalité du marché s’inscrit dans une dynamique plus large de transformation de cette industrie vers des pratiques plus transparentes et responsables, qui prennent par exemple en compte l’ensemble du cycle de vie des produits. En affichant clairement le score nutritionnel de leurs produits, les marques font preuve de plus de transparence et d’engagement envers les enjeux de santé publique, ce qui soutient la relation de confiance avec les consommateurs.

L’intégration du Nutri-Score dans la stratégie produit des industriels est également vectrice de bénéfices en termes de compétitivité. Les produits qui affichent les meilleurs Nutri-Scores sont plus à même d’être privilégiés par les consommateurs, ce qui pousse l’ensemble du marché à élever ses standards de qualité nutritionnelle. Cette dynamique crée un environnement propice à l’innovation, et donc à une concurrence elle aussi saine entre les entreprises pour réussir à se démarquer.

3. Limites et perspectives d'évolution du Nutri-Score

A. Limites actuelles et critiques du système

Bien que les effets positifs du Nutri-Score ne sont pas à remettre en cause, notamment quant à la sensibilisation des consommateurs et à l’amélioration de leurs habitudes alimentaires, plusieurs critiques et limites ont été soulevées quant à son application et à sa portée. Celles-ci mettent en lumière des aspects qui pourraient être révisés ou améliorés afin de mieux répondre aux enjeux nutritionnels contemporains.

Une des caractéristiques les plus décriées du Nutri-Score est sa tendance à simplifier de manière excessive l’évaluation de la qualité nutritionnelle des aliments. En se basant uniquement sur une formule algorithmique, le Nutri-Score ne prend pas en compte la composition globale des aliments, ni le contexte de leur consommation. Certains experts soulignent que cette approche peut induire les consommateurs en erreur, car elle les amène à privilégier des produits qui ont un score favorable, mais qui sont pauvres en nutriments essentiels ou qui sont enrichis en additifs.

Le manque de personnalisation est un autre aspect critiqué du Nutri-Score, puisqu’il applique les mêmes critères à tous les consommateurs sans tenir compte des besoins nutritionnels spécifiques, qu’ils soient liés à l’âge, au sexe, à l’état de santé ou encore au niveau d’activité physique. Cette généralisation peut s’avérer inadaptée pour des populations qui ont des besoins nutritionnels ou diététiques particuliers, comme c’est le cas pour les enfants, les femmes enceintes ou les personnes souffrant de certaines maladies.

Le système de notation actuel ne différencie pas non plus suffisamment les produits naturellement riches en sucres bénéfiques, comme les fruits, de ceux qui contiennent des sucres ajoutés ou des ingrédients transformés. Cela peut mener à une évaluation parfois peu représentative de la qualité réelle de certains aliments, et ne pas encourager la consommation de produits pas ou peu transformés.

Aussi, même si le Nutri-Score incite les industriels à reformuler leurs produits les moins bien notés, il est parfois critiqué en raison de l’absence d’une pression suffisante sur ceux qui n’opèrent pas de changements significatifs dans la formulation de leurs produits. Leur volonté de préserver des saveurs ou des textures appréciées par le grand public peut limiter l’ampleur des modifications effectuées, et ainsi réduire l’impact positif attendu quant à la santé publique.

Le succès et l’efficacité du Nutri-Score dépendent enfin grandement de son adoption volontaire par les industriels, et de sa reconnaissance par les consommateurs. Dans certains pays et secteurs alimentaires, la résistance à l’implémentation de ce système de notation, ainsi que la méconnaissance de son fonctionnement, limitent son potentiel d’influence sur les choix alimentaires et les pratiques industrielles.

B. Améliorations proposées et recherche en cours

Face aux critiques et aux limites identifiées dans le système Nutri-Score, des propositions d’amélioration sont actuellement à l’étude, avec pour objectif de renforcer l’efficacité de cet indicateur. Celles-ci visent notamment à affiner le calcul du Nutri-Score pour une évaluation plus précise de la qualité nutritionnelle des produits, mais consistent aussi en l’exploration de différentes voies pour une personnalisation plus poussée, qui tient davantage compte des besoins spécifiques des différents groupes de consommateurs.

Pour répondre à la critique qui pointe du doigt la simplification excessive de la qualité nutritionnelle des denrées, les chercheurs et les législateurs travaillent à l’intégration de critères et de variables supplémentaires dans l’algorithme du Nutri-Score. Cela pourrait inclure des ajustements pour mieux refléter la qualité des ingrédients, avec par exemple une distinction entre les sucres naturellement présents dans les aliments et les sucres ajoutés. L’objectif est ainsi de rendre le Nutri-Score plus représentatif de la valeur nutritionnelle globale des produits alimentaires.

Des recherches sont également menées pour développer des outils numériques et des applications qui pourraient ajuster le score de recommandation d’un produit aux besoins spécifiques des consommateurs, en leur dispensant des conseils nutritionnels plus ciblés et pertinents. 

En parallèle, des études sont réalisées pour évaluer l’impact du Nutri-Score sur les habitudes alimentaires des populations. Celles-ci permettent de mesurer les changements qui s’opèrent à moyen et long termes au niveau de la sélection des produits et de la santé publique, et donc d’apporter des données concrètes quant à l’efficacité réelle du système.

Un dialogue continu avec les acteurs de l’industrie agroalimentaire est enfin encouragé pour trouver des solutions communes aux défis posés par le Nutri-Score. Ces discussions tournent notamment autour des incitations à reformuler les produits, et des moyens qui permettent de faciliter l’adoption de ce système de notation par le plus grand nombre de marques.

C. Vision future et expansion internationale du Nutri-Score

La vision qui s’exprime autour du futur du Nutri-Score est axée sur son intégration en tant que référence dans la lutte contre les maladies liées à l’alimentation, ce qui passe par son expansion internationale pour que ses effets bénéfiques soient ressentis à l’échelle mondiale. L’objectif est de faire de ce système un outil universel d’aide à la décision pour les consommateurs, indépendamment de leur pays de résidence, tout en adaptant son application aux contextes culturels et alimentaires spécifiques de chaque région géographique.

Le premier enjeu quant à l’avenir du Nutri-Score réside dans son harmonisation au sein de l’Union européenne. Des discussions sont en cours pour qu’il soit adopté en tant qu’étiquetage nutritionnel standardisé par tous les États membres, ce qui renforcerait sa visibilité et son influence sur les habitudes alimentaires à travers toute l’Europe. Cela faciliterait également la tâche aux industriels qui distribuent leurs produits dans plusieurs pays, ceci en leur offrant un cadre réglementaire unique pour l’étiquetage de leurs denrées.

Cependant, pour assurer son efficacité et son acceptation à l’international, le Nutri-Score doit pouvoir s’adapter aux diverses cultures alimentaires. Cela implique notamment une réflexion liée à la manière de calibrer l’algorithme pour qu’il reflète fidèlement la qualité nutritionnelle des produits dans des contextes différents. Il doit ainsi prendre en compte les spécificités diététiques locales, ainsi que l’hétérogénéité des habitudes de consommation.

Le développement de technologies avancées va ainsi jouer un grand rôle pour soutenir l’expansion internationale du Nutri-Score. L’utilisation de l’intelligence artificielle, tout comme des plateformes numériques permettant de personnaliser les recommandations en fonction du profil nutritionnel et des préférences de chaque consommateur, représentent des voies prometteuses. Ces innovations pourraient radicalement transformer l’expérience des consommateurs, et renforcer l’impact du Nutri-Score sur les choix alimentaires individuels.

Pour aller plus loin :

En lien direct avec l’amélioration de la qualité alimentaire et des produits proposés par les acteurs de la chaîne agroalimentaire, nous vous invitons à découvrir notre article consacré aux principes et avantages du PLM, ou Product Lifecycle Management. Cette méthode de gestion se généralise ces dernières années pour suivre les produits, alimentaires ou non, tout au long de leur cycle de vie, et ainsi optimiser autant que possible les chaînes d’approvisionnement et de production.