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Créer une culture de collaboration et d’engagement
Par rapport aux entreprises anglaises bien plus centrées clients [1], les françaises devraient œuvrer à passer d’une culture centrée uniquement sur les produits ou l’excellence opérationnelle, à une culture centrée sur les services.
En effet, cela améliora le parcours vécu et permettra la délivrance d’une expérience client de qualité [2].
Pourquoi ? Ne faut-il pas être plutôt centré client, comme je le rabâche depuis 2006 sur clientaucoeur.com ?
Je vais faire une parenthèse explicative : en fait, tant qu’il s’agit de concevoir de nouvelles expériences en récoltant et analysant la connaissance client, en modélisant des parcours clients, etc. Là… il faut être centré client !
Dès lors que vous avez conçu le(s) parcours idéal(aux) « sur papier », alors vous avez tout intérêt à vous focaliser sur le service à délivrer et surtout sur vos collaborateurs.
En concevant le service qui vous permettra de matérialiser cette expérience client, nouvellement conçue, vous ne perdrez pas de vue le client, pour autant !
Donc, le design de service vous permet de passer de la phase conception d’expérience à la phase opérationnelle et organisationnelle.
Parce qu’une entreprise axée sur le service :
1) se concentre sur la conception holistique de ce que le client vit comme expérience auprès de personnes, d’outils (ex. applications ou canaux de contact) et systèmes, même au-delà de ce qu’il ne voit pas (la fameuse ligne de visibilité),
2) implique ses collaborateurs dans la conception du service global - et l’expérience client qui en résulte.
Cela signifie que la culture centrée sur les services est une compétence que les entreprises doivent approfondir — c’est-à-dire, aller au-delà du bonheur au travail des collaborateurs (par ex. Great Place to Work : c’est bien, mais insuffisant).
Pour réussir à motiver les gens – sans avoir d’impact négatif sur leur expérience – dans la transition de la centricité produit à la centricité service, vous devriez :
- Prioriser l’engagement du dirigeant et l’adhésion du comité de direction.
- Favoriser la collaboration en interne.
- Être clair sur le rôle de chacun et utiliser les soft-skills qui sont nécessaires.
Priorisez l’engagement du dirigeant et l’adhésion du comité de direction
Le / la PDG devrait s’engager pour encourager l’usage du design de service. S’il ou elle se sent concerné(e), il ou elle allouera les ressources dont les responsables de l’expérience client ont besoin pour mettre en place une culture de design de service : formation, embauche, évangélisation, adoption à l’échelle de l’entreprise et allocation d’endroits confortables dans les locaux (espaces et laboratoires collaboratifs et d’innovation).
Comment obtenir son support ? Plus facile à dire qu’à faire, allez-vous me dire !
Faites appel à la fois à la raison et à l’émotion :
- Faites une étude de cas de rentabilité. Établissez un lien avec la stratégie globale de l’entreprise et démontrez le retour sur investissement du design de service. Communiquez sur les succès – même les plus petits – pour convaincre également les ingénieurs ou les cadres exécutifs sceptiques.
- Améliorez la compréhension du design de service en leur permettant de « mettre les mains dans la farine ». Embarquez le/la PDG à faire l’expérience en direct de la créativité et de l’empathie grâce à des ateliers de design thinking pour qu’il/elle se glisse dans la peau du client.
- Donnez du pouvoir aux collaborateurs. Pour transformer des collaborateurs engagés en collaborateurs impliqués (rappel sur la différence entre engagement et implication), montrez au PDG et aux cadres supérieurs comment les « entreprises libérées » ou holacratiques[3] (avec hiérarchie plate) ou, ad minima, les entreprises fonctionnant en escouades (4 à 6 personnes travaillant autour de projets) peuvent responsabiliser les collaborateurs et les rendre engagés à mener des changements réalisables et porteurs de valeur.
Le Groupe Hervé est un fournisseur industriel qui a été l’une des premières entreprises à expérimenter en France, dans les années 2000, une forme d’auto-organisation : les managers ne décident pas, ils sont chargés de favoriser les décisions collectives des salariés et d’assurer la cohérence entre les équipes.
Favi, une fonderie française et sous-traitant des constructeurs automobiles est une entreprise centrée sur le client depuis les années 1980. La direction de Favi met l’accent sur l’amour du client, la confiance dans les personnes, l’innovation et la liberté à s’auto-organiser. Les équipes sont organisées dans de « petites usines » habilitées à changer / adapter leur poste de travail individuel, si besoin.
Favorisez la collaboration
Ça c’est la partie que je préfère !
Alignez des services et des équipes disparates autour des changements en cours et à venir.
Les gens sont plus enclins à changer les choses lorsqu’ils collaborent et qu’ils ont la maternité ou paternité des idées à déployer.
C’est 12 ans d’expérience qui me font prendre la parole pour vous conseiller de :
- Engager le personnel en contact (par ex. service client ou commercial) tôt dans l’accompagnement au changement. Les middle managers, en particulier, doivent acquérir de l’empathie envers les clients et apporter leurs propres contributions. Donnez-leur les moyens de repenser le service et de mettre en œuvre de nouveaux modèles opérationnels. Pour ce faire, invitez-les à des ateliers de design thinking et créativité en compagnie de designers. Ils pourraient vous aider à écrire le brief du design de service.
C’est quoi un brief ? C’est un cahier des charges qui stipule les attentes de l’utilisateur ou du client. Il contient toutes les informations récoltées lors de l’étude clients ou utilisateurs : ce qu’il veut faire (jobs to be done), ses contraintes, ses attentes… Le brief identifie le « Quoi » mais aussi le « Pourquoi » et le résultat du Design Thinking le « Comment ».
L’entreprise apprenante est une solution intelligente à envisager, car elle positionne les collaborateurs dans une dynamique d’empowerment sur leur capacité à s’adapter.
La SNCF possède son Université du Service en interne. Elle délivre des formations, des services et des outils pour favoriser l’empathie pour le client et l’imprégnation de la centricité client et de l’expérience client. Par exemple, elle aide les managers intermédiaires et le personnel en contact à accroître leurs compétences en relation client afin de délivrer de meilleures expériences clients.
L’entreprise qui partage la connaissance sur les clients et communique en interne sur les initiatives centrées clients favorise l’appropriation des nouvelles pratiques en apportant du sens. Ça aide aussi à embarquer les gens dans des démarches collaboratives.
Chez un retailer, le PDG a décidé d’engager les middle managers dès le début et tout au long du processus de design d’expériences et de services. Depuis l’étape de l’étude client (collecte et analyse des feedbacks) à la conception du service, y compris l’étape d’idéation, les managers ont pu comprendre le sens et l’importance de ce qui a été entrepris pour répondre aux irritants des clients. Par conséquent, ils acceptaient plus volontiers de fournir des ressources humaines et du temps pour l’expérience client.
- Réunir des équipes inter-fonctionnelles (transverses). Il est important d’avoir une compréhension de son propre rôle, mais aussi le sens d’une vision commune et d’objectifs partagés. Cela aide à surmonter les désagréments du fonctionnement en silos.
Par exemple, travailler sans designers, comme beaucoup d’entreprises françaises le font souvent, conduit à l’échec - mais s’appuyer uniquement sur les designers n’est pas bon non plus. La diversité des acteurs est importante.
Les équipes les plus performantes en charge de la résolution de problèmes sont cognitivement diverses et petites (environ six personnes).
Travailler avec des consultants externes aide parce qu’ils sont moins contraints par des facteurs humains, financiers et organisationnels internes, de ce fait ils sont plus en mesure d’éviter les biais cognitifs.
Intesa, une banque italienne, a mis en place une « usine numérique » pour aider à transformer les processus back-end (d’arrière-plan… qui font tourner les applications, par ex.). Au lieu de travailler avec une approche descendante, les équipes transverses travaillent avec agilité (flexibilité et itération). Pour savoir quels processus prioriser, la banque évalue le coût et la pertinence commerciale de chaque processus. Et ça ! Ça parle aux dirigeants !
- Lancer une communauté en ligne du projet afin de socialiser ses avantages. Cela va aider à clarifier les avantages des méthodologies de design thinking de service, en particuliers pour les ingénieurs.
La communauté rend plus facile la définition du concept, la vision, la transparence, la compréhension, la collaboration et l’engagement. Ce sera également plus facile pour mettre en évidence les contributions personnelles des collaborateurs et le travail exceptionnel des champions du projet.
Chez un fabricant de revêtements de sol, un champion du design de services lance, forme et tire parti de plusieurs communautés de collaborateurs (physique et en ligne) pour évangéliser les pratiques centrées client et diffuser l’utilisation du design thinking. Chaque communauté s’engage à former d’autres équipes à la mise en œuvre du design thinking de services à l’échelle de l’entreprise et des pratiques exemplaires. L’équipe de community management propose un ensemble d’outils et du soutien au niveau compétences…
- Infuser une compréhension commune. Il est important d’utiliser une approche collaborative afin d’établir une compréhension commune des besoins et des attentes des clients et des collaborateurs.
Pourquoi ? Parce que les outils conçus de façon collaborative et permettant la visualisation – comme les personae hypothétiques, les parcours client et la blueprint de services – améliorent la compréhension du client.
Un fournisseur de logiciels B2B Français a utilisé des personae hypothétiques conçus par ses propres développeurs pour les aider à faire preuve d’empathie envers ses clients lors du développement d’applications.
- Cartographier les scénarios de l’alignement des équipes avec une démarche collaborative. Une fois que les équipes sont claires sur la définition et la compréhension du client et de l’expérience attendue, modélisez les nouveaux services – ensemble – afin de créer le nouvel écosystème de services. Aligner les rôles, les services, les fonctions, les interdépendances et les systèmes à l’aide d’une blueprint[5].
Pour récupérer des clients perdus et être classé à nouveau comme premier dans son secteur, Aramark Parks & Resorts a cartographié (du point de vue du client) la blueprint de l’expérience d’un hôtel concurrent haut de gamme. Puis, ils ont modélisé leur propre expérience de villégiature.
La comparaison des deux blueprints a permis de mettre l’accent sur les différences dans les services, les normes et les processus, entre les deux hôtels. Cette comparaison les a aidés à concevoir de nouveaux services, à moderniser les autres, à former le personnel et à mettre en œuvre un nouveau système de récompense des clients fidèles…
- Utiliser des ateliers de résolution de problèmes pour animer les discussions sur la blueprint de services. Il est important de s’engager en direct avec les personnes impliquées. Des outils pour la résolution de problème et la prise de décision comme Dialogue Mapping[6] ou l’activité de Brainswarming [7] peuvent aider. Les participants bénéficient du partage d’une vision commune et unifiée et se sentent impliqués, en particuliers les sceptiques.
Une enseigne de GSA a utilisé un atelier de Brainswarming pour aider ses collaborateurs à s’impliquer à l’étape d’idéation, lors de la conception de services. Ils devaient trouver des solutions à un problème d’expérience client au moment du passage en caisse lors du parcours client. L’utilisation de synonymes [8] pour renommer le problème à résoudre et de la présentation des solutions possibles sous forme de branches et ramifications d’arbre a facilité et ouvert le champ de réflexion sur la façon de délivrer la nouvelle expérience client et ensuite les ressources correspondantes.
Une filiale française d’une marque hôtelière internationale a appliqué une méthode d’analyse des points positifs, qui ont été expérimentés par le passé, lors de l’adoption de changements majeurs. L’objectif était de répliquer les meilleures pratiques ayant fait leurs preuves pour s’en servir de leviers afin d’accompagner le changement en douceur, en reproduisant les succès, au lieu de perturber les gens avec de nouvelles approches.
[1] Selon Forrester Research.
[2] Pour découvrir les étapes pour rendre votre entreprise centrée client, lire gratuitement le short book de Lidia Boutaghane (75 pages) intitulé : Comment garantir la durabilité de votre business en temps de crise grâce à la centricité client.
[3] Extrait de Wikipédia : [système de management qui] « (…) permet de disséminer les mécanismes de prise de décision au travers d'une organisation avec une autorité distribuée et des équipes auto-organisées, se distinguant des modèles pyramidaux top-down plus classiques. »
[4] Source : Favi
[5] Pour découvrir et suivre les bonnes pratiques du métier, inscrivez-vous à la future newsletter de Lidia Boutaghane, en téléchargeant gratuitement le short book (75 pages) intitulé : Comment garantir la durabilité de votre business en temps de crise grâce à la centricité client.
[6] Le Dialogue Mapping est une méthode comme le Mindmapping (carte heuristique) mais pour les conversations.
[7] Pour en savoir plus sur le brainswarming, voir cette vidéo: Brainswarming: Because Brainstorming Doesn't Work, dans HBR Video par le Dr Tony McCaffrey.
[8] En fait, ce sont les hyponymes qui ont été utilisés. Les hyponymes sont utilisés pour désigner un membre particulier d’une classe plus large. Par ex. : Monture, Canasson et Destrier sont des hyponymes de Cheval.
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Lidia Boutaghane, après avoir créé et géré une agence Web en 1998 et lancé une startup Informatique en 2000, a créé en 2008 un cabinet de conseil ClientauCoeur.
Aujourd'hui, elle conseille et forme sur Internet – ceux qui s’épuisent avec la prospection de nouveaux clients – à générer des bénéfices en délivrant des expériences centrées sur les clients et les collaborateurs.
Elle est aussi l'auteur d'un short book "Comment garantir la durabilité de votre business en temps de crise grâce à la centricité client" téléchargeable gratuitement sur ClientauCoeur.com/Reloaded.